Sébastien Fritsch, Invitation pour la petite fille qui parle au vent
Chaque âge a ses questions, ses inquiétudes, ses joies et ses blessures, ses hésitations et ses certitudes.
De Paris à Nancy, des bidonvilles kenyans aux portes du Mercantour, des années 1950 à aujourd'hui, Invitation pour la petite fille qui parle au vent évoque celles d'un homme ordinaire, un médecin légiste timide, et de son entourage.
Nous croisons ainsi une romancière talentueuse, une mère de famille dépassée, trois sœurs, un amoureux sans avenir... et la petite fille qui parle au vent.
Chacun, à sa manière, nous suggère que la vie se bâtit de rencontres, mais également d'absences.
Thomas, un jeu homme maladroit et timide, dissimule un drôle de présent dans un petit boîtier. Salomé aime répondre au téléphone car elle considère que c’est une mission d’utilité publique. Clara, elle, a le cœur qui palpite quand elle voit des traînées de terre sur le sol propre de sa maison. Il y a aussi Alice, écrivain en herbe et assistante à l’écoute, et Mlle Valentin, cette jolie vendeuse blonde…
Poétique et mystérieux, le titre de ce roman ne pouvait qu’attiser ma curiosité, à laquelle s’est jointe l’envie de découvrir un nouvel auteur et une nouvelle maison d’édition.
Il est extrêmement difficile de parler d’un tel roman sans trop en dire. Des portraits sont esquissés, d’autres extrêmement fouillés, tous plus délicieux les uns que les autres. Le personnage de Thomas est notamment une véritable réussite. Les descriptions particulièrement précises et agréables à lire montrent à quel point l’auteur a eu le souci du détail, elles n’étouffent cependant pas la progression de l’histoire mais y participent, au contraire. Tout est savamment dosé. De cette galerie de portraits qui se déploie sous nos yeux, se détache un fil qui finira par former une toile. La technique narrative est maîtrisée à la perfection et, pour reprendre les mots de Maurice Motet, éditeur-personnage de notre roman, Sébastien Fritsch m’est apparu comme un véritable « architecte de l’intrigue ». Ces vies qui nous sont racontées se croisent et se percutent, parfois violemment, parfois tendrement. Et c’est bien la Vie qui est le personnage principal de ce roman, ses échecs, ses bizarreries, ses moments d’amitié et d’entraide. Si la présence des êtres chers est essentielle, leur absence n’est pas moins importante. C’est d’ailleurs aussi en cela que ce roman est original : il donne un rôle primordial aux absents, en témoignent certains titres de chapitres parfois énigmatiques. Enfin, si l’aspect poétique de ce texte est une évidence, il ne faut pas non plus omettre l’aspect humoristique, c’est aussi ça, la vie : des sourires et un peu de légèreté.
Un grand merci à l’auteur, Sébastien Fritsch, pour sa dédicace personnalisée et fort sympathique !
L’œuvre en quelques mots…
« J’ai souvent dit à des femmes : je veux coucher avec toi ; mais je n’ai jamais dit : je t’aime. Dire je t’aime, c’est dire : je veux mourir avec toi. C’est autrement plus important que de coucher. C’est tout donner, jusqu’à son dernier souffle. » (p.32-33)
« Qui suis-je ? D’où viens-je ? Où vais-je ? La réponse, nous l’avons, au départ. Mais elle vient avant que nous sachions qu’il existe une question. Et quand la question surgit, nous revenons en arrière, cherchons, creusons, remuons ciel, terre, cœur, âme. Et nous ne trouvons que ce qui nous arrange à cet instant précis, cet instant tardif. De ce fait, nous ne débusquons jamais la vraie réponse, celle que nous avions au commencement de notre vie et que nous avons enfouie longtemps. Nous nous contentons de ce que nous avons, tout en nous persuadant que nous sommes honnêtes avec nos souvenirs. » (p.131)