Gardner McKay, Toyer
Los Angeles est la proie d’un monstre très particulier. Un homme qui ne viole ni ne tue les femmes mais leur réserve un sort peut-être pire encore : il les séduit, les kidnappe, joue avec elles, puis les abandonne à l’état de mort cérébrale. Neurologue, Maude Garance est en charge des neuf victimes de celui que la presse a surnommé Toyer. Bouleversée par le sort de ces femmes, elle accepte la proposition que lui fait Sara Smith, une jeune journaliste ambitieuse : s’adresser directement au coupable par voie de presse. C’est le début d’une relation très particulière, par médias interposés, entre Maude et Toyer, qui bien vite passionne un lectorat avide de sensations. Grisé par une célébrité grandissante, Toyer commettra-t-il le faut pas qui permettra de l’identifier ? Alors que dans l’ombre Maude et Sarah continuent d’enquêter, elles ne tardent pas à réaliser que leur mystérieux interlocuteur est beaucoup plus proche d’elles qu’elles ne le croyaient.
Cordotomie, n. f. : section d'un cordon de la moelle épinière dans un but thérapeutique. Un acte médical aussi rare que délicat. Un mot dont la plupart des habitants de Los Angeles ignoraient sans doute la définition jusqu’à il y a peu. Jusqu’à ce qu’un monstre s’en prenne à de jeunes femmes innocentes. Un mode opératoire simple : il s’arrange pour croiser leur route, se montre particulièrement sympathique et serviable, avant de les abandonner, non sans avoir prévenu la police, à l’état de légumes. Maud Garance est neurologue, c’est elle qui prépare les jeunes femmes à leur nouvelle vie. Ces « invalides » laissées par Toyer en état de mort cérébrale occupent tout son temps. Il en va de même pour Sara Smith, une journaliste qui rêve de résoudre l’affaire de sa vie. Quand Sara propose à Maud d’écrire, par le biais du journal, à celui que la neurologue elle-même a surnommé « le joueur », celle-ci refuse, avant de se rétracter. Leur correspondance, affichée en une des journaux, passionne. Mais il n’est pas impossible qu’elle fasse des dégâts dans les deux camps.
Toyer est un roman exceptionnel, composé de trois parties, comme trois actes d’un drame : « Le commencement », « Le milieu », « La fin ». 761 pages et aucun meurtre. Pour le procureur de Los Angeles, cela ne fait d’ailleurs aucun doute : il y a des priorités et Toyer n’en est pas une puisqu’il n’a tué personne. Une aberration qui pointe du doigt les failles de la justice américaine. Le lecteur ne peut qu’être indigné par le peu d’attention portée par la justice à cette sordide histoire. 761 pages et une tension qui va crescendo. Les rencontres entre Toyer et ses proies sont incroyablement terrifiantes car l’homme sait jouer avec les nerfs. J’ai notamment trouvé son mode opératoire fascinant car il faut savoir que Toyer n’est pas qu’un psychopathe mais aussi un homme doté d’un grand talent et profondément blessé par la vie. Cela n’excuse en rien son attitude mais il est toujours intéressant de comprendre les motivations d’un tueur. Toyer est un roman dense mais les pages se tournent toutes seules, jusqu’au baisser de rideau. Un thriller passionnant dans lequel les masques ne se portent pas que sur les planches…
L’œuvre en quelques mots…
« Il est assis sur le canapé, les bras écartés sur le dossier.
Elle l’entend à peine, et lorsqu’elle l’entend, quand ses paroles résonnent dans son esprit, elle n’est pas sûre d’avoir bien entendu. Elle veut lui demander comment il connaît le nom de Carol mais n’arrive pas à former les mots.
« Allons, ne m’en veuillez pas.
- Je ne vous en veux pas. »
La première vague de peur. Oh ! doux Jésus, qu’est-ce qui se passe ? Reste calme. » (p.30)