Justin Cronin, Huit saisons
Huit Saisons, huit nouvelles qui, en fait, constituent un roman. L'histoire d'une famille dont chaque membre va son chemin : les études, le travail, le mariage, les enfants... Mais, chez Justin Cronin, ce n'est jamais un chemin facile, car chacun a son secret : un amour qui n'ose pas se déclarer, une grave maladie qu'on tente de cacher, un drame vécu autrefois qui revient vous hanter... Sous l'apparente banalité des jours et des destins, sous le tissu protecteur de l'affection et de l'entraide, se dissimulent bien des angoisses et des détresses.
Novembre 1979. Arthur et Miriam prennent la route pour retrouver leur fils O’Neil à l’université où celui-ci fait ses études. Le couple paraît solide, uni par des années de vie commune, deux enfants et un amour tendre, celui des gens simples qui traversent la vie main dans la main. Pourtant, chacun a un secret. Pour Arthur, il s’appelle Dora Auclaire. Pour Miriam, il s’appelle cancer. C’est la fin de l’automne, les dernières feuilles tombent. Elles symbolisent le commencement et la fin. C’est l’histoire d’un trajet, de retrouvailles, d’une rencontre. C’est l’histoire d’un départ, surtout.
A cette première nouvelle qui offre au lecteur les balbutiements d’une histoire plus complexe, qui s’étire, pour s’achever, enfin, de manière magistrale, succèdent sept autres récits, tous liés les uns aux autres. Car, en fait de « nouvelles », ce sont huit tranches de vie que nous fait partager l’auteur, huit moments volés à une même famille, huit photographies d’un roman où chaque personnage joue un rôle essentiel. Nous retrouvons ainsi, dans la deuxième nouvelle, O’Neil Burke, quatre années après la visite de ses parents à l’université. Le jeune homme est peintre en bâtiment mais il attend, surtout, celle avec qui il partagera sa vie. Il se cherche. On le retrouvera ensuite quelques années plus tard, au matin de son mariage, professeur d’anglais et amoureux comme jamais de la vie. La Vie. Justin Cronin la décrit avec une délicatesse et une sensibilité rares, à travers des thèmes douloureux comme le mensonge et les blessures secrètes. La tristesse des personnages sert la gorge car les situations vécues sont familières. Mais, toujours, sa plume ravive sur la page l’idée que la vie est la plus forte.
C’est étrange. Quand j’ai achevé ma lecture, je ne me sentais pas emballée plus que cela. En écrivant mes sentiments sur ce récit, j’ai l’impression que mon regard a changé et je crois que Justin Cronin a réussi à me toucher parce qu’il a écrit, il faut bien l’avouer, un très beau texte. C’est un livre qui mérite d’être lu, dans l’instant. Et qu’importe s’il est vite oublié. C’est aussi ça, la vie. Des moments fugaces, des saisons qui défilent.
L’œuvre en quelques mots…
« Assis à une longue table de bois de la bibliothèque universitaire, O’Neil n’a pas remarqué qu’une tempête approchait ; il a poussé de côté livres et notes pour poser la tête dans le creux de ses bras croisés, et il dort profondément, et rêve. C’est un rêve simple et heureux – un rêve de printemps et de champ doré dans les montagnes – et O’Neil y est à la fois partout et nulle part. Il est l’âme du rêveur et le rêve même, le soleil et celui qui rêve au soleil, et son plaisir s’augmente d’une impression de déjà vécu ; bien qu’il l’ignore, maintenant et à jamais, c’est un rêve qu’il fait depuis des années. » (p.98-99)