Jospeh Joffo, Un sac de billes
Paris 1941. Joseph a dix ans. Dans le pays occupé par les nazis qui obligent tous les Juifs à porter l'étoile jaune, le jeune garçon et son frère Maurice tentent de franchir la ligne de démarcation sans papiers, pour gagner la zone libre.
Le titre, Un sac de billes, dit tout du roman. C’est l’histoire d’un enfant qui ne demandait rien d’autre que de pouvoir jouer aux billes. Mais en 1941, les petits enfants juifs n’ont pas le droit de jouer aux billes. Ils n’ont pas le droit de jouer tout court. Ils n’ont pas le droit de vivre.
Dans son prologue, Joseph Joffo écrit qu’Un sac de billes raconte « l’histoire de deux petits enfants, dans un univers de cruauté, d’absurdité et aussi de secours parfois les plus inattendus. » Je ne saurais définir l’œuvre mieux que l’auteur. C’est vrai, l’histoire est cruelle mais Joseph Joffo n’a pas écrit un texte larmoyant. Pour lutter contre la brutalité et la folie des adultes, il a, enfant comme adulte, eu recours à deux armes : la tendresse et l’humour. Son œuvre en est remplie. Il y a beaucoup de tendresse et d’amour dans l’histoire et le parcours de Joseph. Amour de ses parents, prêts à laisser partir leurs fils seuls à Menton pour les protéger. Amour de ses grands frères, Henri et Albert qui sont en zone libre et que l’enfant doit rejoindre. Amour enfin qui l’unit à Maurice, son frère, avec qui il quitte Paris et va vivre de nombreuses péripéties avant que la France ne soit à nouveau libre. C’est également un récit où l’humour tient une place essentielle. Cet humour est présent dans le regard amusé que l’auteur porte sur cette période de sa jeunesse mais c’est aussi l’humour qui a permis aux deux enfants de s’en sortir. Entre parties de foot sur la plage, travail dans un camp pétainiste et arrestation au siège de la Gestapo, Maurice et Joseph vont grandir, s’interroger sur l’absurdité de certains actes et faire la connaissance de gens bons, qui leur apporteront une aide précieuse.
En lisant ce récit, on se dit que Jospeh Joffo a eu de la chance. Beaucoup de chance. Et que nous en avons tout autant de pouvoir lire son histoire.
Vous pouvez lire, si vous le souhaitez, les avis d'Iluze et de Mr K.
L’œuvre en quelques mots…
« Mais qu’est-ce qui vient d’arriver ? J’étais un gosse, moi, avec des billes, des taloches, des cavalcades, des jouets, des leçons à apprendre, papa était coiffeur, mes frères aussi, maman faisait la cuisine, le dimanche papa nous emmenait à Longchamp voir les canassons et prendre l’air, la semaine en classe et voilà tout, et tout d’un coup on me colle quelques centimètres carrés de tissu et je deviens juif.
Juif. Qu’est-ce que ça veut dire d’abord ? C’est quoi, un Juif ? » (p.23)
« Ce que je comprends le moins, c’est la violence de ce soldat. Sa mitraillette braquée, ses bourrades, ses yeux surtout, j’ai eu l’impression que le rêve de sa vie aurait été de m’enfoncer dans le mur et je me pose la question : pourquoi ?
Je suis donc son ennemi ?
On ne s’est jamais vus, je ne lui ai rien fait et il veut me tuer. » (p153-154)