Yoan Smadja, J'ai cru qu'ils enlevaient toute trace de toi

« Un pays tout de vert, de terre, et d'affliction vêtu. »
C'est en avril 1994 que Sacha, reporter de guerre française, découvre le Rwanda – et cesse de croire en Dieu. Elle parcourt ses mille collines au volant d'une jeep de la Croix-Rouge, aux côtés de Daniel, médecin tutsi, à la recherche de sa femme et de leur fils, égarés dans la tourmente.
C'est l'histoire d'une femme perdue, d'un carnet retrouvé, d'une fleur gravée au couteau dans l'écorce des arbres et dans le cœur des hommes.
Vraiment, un très beau roman. Un roman que l’on a envie de garder longtemps dans le petit écrin que constitue une mémoire de lecteur, vous voyez. En 260 pages, il dit beaucoup. Il dit même l’essentiel. Les grandes lignes du génocide des Tutsis qui a noirci l’Histoire du Rwanda en 1994, présentées de manière claire, sans viser l’exhaustivité et par le biais d’un personnage attachant, Sacha, une journaliste de guerre pour Le Temps qui a pour habitude de toujours suivre son instinct. Alors qu’elle achève un reportage sur les élections en Afrique du Sud, elle va découvrir l’horreur au Rwanda après avoir croisé la route de plusieurs personnages, dont Daniel, un médecin tutsi : c’est là que l’Histoire rencontre l’histoire. Celle qui est au cœur du récit. L’histoire de Daniel et de Rose, celle de leur amour, de leur enfant, de leur séparation et de leur volonté, plus forte que tout, de se retrouver. Celle de dizaines de petites roses et du temps qui fait son œuvre.
Vraiment, un très beau roman. D’ailleurs, en écrivant, l’émotion me gagne et je mesure la chance que l’on a de pouvoir lire de telles pépites. Mention spéciale pour le titre que je trouve absolument sublime et pour le choix de l’illustration sur la version poche, parfaite !
Je remercie Babelio et les Editions Pocket pour cette lecture… triste, belle, nécessaire.
L’œuvre en quelques mots…
« C'est en avril 1994 que j'ai demandé à Dieu de divorcer. »
« J’ai cru qu’ils m’étouffaient. J’ai cru qu’ils effaçaient ce que nous avions vécu. J’ai cru qu’ils étaient des dizaines ou des milliers.
J’ai cru qu’ils enlevaient toute trace de toi.
J’ai cru qu’ils enlevaient toute trace de moi.
J'ai cru que je ne serais plus que poussière. A mesure qu'ils s'avançaient en moi, mon corps s'enfonçait dans la terre. Peut-être que le Rwanda et moi ne faisions plus qu'un. Ils nous ont violés au même instant. »
« Chaque fleur a provoqué en moi une rosée. L'incendie jamais ne s'éteindra. Mais les flammes ont cessé de virevolter. Seules persistaient les braises, la honte. »
« Petite, je voulais une vie extraordinaire. Aujourd'hui, je veux seulement une vie. »