Manon Fargetton, Aussi libres qu'un rêve

En cette fin de XXIe siècle, la loi des Dates de naissance régit l’accès aux métiers. Né en janvier, vous avez accès au métier de vos rêves : acteur, chanteur, tout est possible. Né en décembre, préparez-vous à racler le fond de l’océan et à plonger les mains dans des algues gluantes !
Minöa et Silnëi sont sœurs jumelles, nées à quelques minutes d’intervalle la nuit du 31 décembre. La première à 23 h 58 et la seconde à 0 h 17 ! La tyrannie des Dates de naissance leur promet des destins radicalement différents, mais cela ne les empêchera pas d’unir leurs forces pour combattre l’injustice et l’ordre établi, aidées par Kléano, le chanteur rebelle d’un groupe de rock…
Bon, avant de rédiger ma critique, j’ai consulté Internet car j’étais intriguée par une histoire de dates… Je me demandais si Manon Fargetton avait été influencée par des lectures contemporaines en écrivant son premier roman, comme Hunger Games, La Déclaration ou encore Divergente, sortis respectivement en 2008, 2007 et 2011. Or, Aussi libres qu’un rêve a été rédigé en 2006, avant la vogue de dystopies jeunesse. Le seul roman d’anticipation dystopique destiné clairement à la jeunesse que je connais et qui précède cette date est Le Passeur de Lois Lowry, dont je recommande d’ailleurs chaleureusement la lecture… On peut donc dire que Manon Fargetton a eu le nez creux en s’engageant dans une voie qui allait devenir quelques mois après la parution de son roman un véritable phénomène littéraire. Autant le dire tout de suite, je suis une bonne cliente car j’adore les dystopies et il y a plusieurs éléments qui m’ont plu dans ce roman, le premier et le plus important étant bien évidemment le point de départ du roman, à savoir une société futuriste dans laquelle les dates de naissance définissent le destin des hommes et des femmes et ce, dès leur plus jeune âge. Le deuxième élément positif et qui est étroitement lié, c’est le fait que les protagonistes sont deux sœurs jumelles, l’une née le 31 décembre à 23h58 et l’autre le 1er janvier à 0h17. J’ai apprécié également les destins croisés des deux personnages masculins principaux, Kléano et Nériss, adolescents comme Minöa et Silnëi. Les pensées et aspirations de ces quatre personnages m’ont paru globalement assez convaincantes. Il y a quand même quelque chose qui m’a manqué et je pourrais presque dire que le défaut de ce roman est qu’il est trop court. Je ne voudrais pas trop insister sur les points négatifs sachant que l’auteure a publié son roman alors qu’elle était âgée de 19 ans, mais certaines très bonnes idées auraient mérité d’être développées : le quotidien des personnages est finalement assez peu décrit et l’enchaînement des événements est un peu rapide. D’ailleurs, la deuxième partie est très courte par rapport à la première, tout s’accélère… à l’extrême ! Si j’enlève ce critère de la longueur, deux éléments ne m’ont pas convaincue : l’écriture sms des adolescents (cela n’apporte rien à l’histoire) et leurs sentiments amoureux (des passages très maladroits...).
Dans l’ensemble donc, une lecture divertissante, une idée de départ vraiment remarquable même si l'on sent qu’il s’agit d’un premier roman. J’ai hâte de découvrir d’autres écrits de l’auteure - je ne doute même pas de leur qualité - et de savoir ce qu’en pensent les adolescents, cible privilégiée de ce roman.
L’œuvre en quelques mots…
« Pleure, si tu en as besoin, ne refoule pas tes larmes, sinon elles pourraient former à l'intérieur un torrent qui te noierait peu à peu. » (p.112)
« Maintenant il faut agir.
Tant de personnes m’envient, à commencer par Minöa, même si elle ne le dira jamais. Et pourtant je ne suis pas à ma place.
Je vais partir. Loin. Loin des Janviers et des autres.
Où ? Je ne sais pas mais je trouverai. Demain.
Je frissonne, je transpire. J’ai froid et j’ai chaud.
Je ne sais plus. Quelle importance ?
Demain. » (p.118)