Damien et Maria Kempf, Monstres médiévaux

L'engouement de plusieurs générations pour les grandes sagas fantastiques témoigne que les créatures surnaturelles, qui ont donné lieu à des œuvres d'une richesse inouïe au Moyen Âge, continuent à fasciner, à nourrir notre soif de chimères.
Il était grand temps de faire sortir de bibliothèques parfois inaccessibles au public ces images de monstres qui ont structuré la culture médiévale.
Doit-on s'étonner que nombre de ces figures nous paraissent étrangement familières ?
J’ai tout d’abord été très surprise par le format de cet ouvrage. Je m’attendais à un grand format, plutôt volumineux, mais il n’en est rien : 22 x 17 cm environ et moins de cent pages. A l’intérieur, le texte forme un bloc et est aéré par de nombreuses illustrations. Pas de table des matières comme je m’y attendais, pas de classification des monstres, difficile de se repérer si l’on veut revenir sur tel ou tel point abordé. De fait, je ne pense pas que le livre ait pour ambition d’être exhaustif sur le sujet qu’il aborde, il présente plutôt une approche simple et claire de ce que l’on considère comme monstres au Moyen Âge. Monstres médiévaux s’ouvre sur une citation d’Alfred Jarry : « Il est d’usage d’appeler monstre l’accord inaccoutumé d’éléments dissonants […] » et nous sommes servis en la matière ! Suivent ces mots : « J’appelle monstre toute originale inépuisable beauté. » De la difformité à la beauté, il n’y a donc qu’un pas. C’est vrai qu’elles sont belles toutes ces représentations de monstres, pas vraiment les monstres en eux-mêmes d’ailleurs – mais c’est un goût personnel – non, ce qui est beau, c’est leur mise en valeur, ce sont les pages de manuscrits qui nous sont offertes sur un papier de qualité. Magnifiques pages, vraiment. Les monstres sont-ils des animaux ? Sont-ils des humains ? Les auteurs, Damien et Maria Kempf tous deux historiens de l’art, tente de répondre à ces questions en éclaircissant leur propos par le prisme de la religion, inévitable si l’on souhaite parler sérieusement de la période médiévale. Il est ensuite question des écrivains et artistes qui ont « rivalisé de talent pour donner vie à ces créatures fantastiques », puis sont énumérés différents monstres, certains que l’on ne présente plus, d’autres un peu moins connus : les Panoti, les Cynocéphales, les Sirènes, les Licornes, les Loup-garous, les Griffons ou encore la baleine qui était souvent associée au diable dans l’univers médiéval. La référence au Livre des merveilles de Mandeville, une des œuvres les plus populaires de la fin du Moyen Âge, est une véritable invitation. Malheureusement, elle ne semble pas disponible, j’ai fait ma petite recherche.
J’ai passé un très bon moment avec cet ouvrage et je prendrai plaisir à le relire. Je regrette cependant qu’il ne soit pas plus complet, j’aurais apprécié notamment, en plus des illustrations, des retranscriptions d’extraits de manuscrits présentant les monstres. Pourquoi pas également un chapitre sur les monstres dans la littérature médiévale… J’imagine qu’il y aurait eu beaucoup à dire… Dommage !
Un très grand merci à Babelio et aux Éditions Intervalles pour cette lecture enrichissante !


