Zlata Filipovic, Le journal de Zlata
1991. Zlata a onze ans lorsque la guerre éclate à Sarajevo. Du jour au lendemain, l’insouciance de la jeunesse laisse place à l’indignation. Les jeux, l’école et les rires ont disparu devant les tirs incessants, la mort des proches, les nuits d’angoisse dans les caves. Pour dire sa colère, il ne reste à Zlata que son journal, tendrement surnommé Mimmy. « L’horreur a remplacé le temps qui passe », écrit-elle avec une lucidité poignante.
Un texte exceptionnel qui nous fait partager le quotidien d’une enfant de la guerre.
La première page du journal de Zlata qu’il nous est offert de lire est datée du lundi 2 septembre 1991. Zlata est alors une jeune écolière qui, après des vacances reposantes, fait son entrée en sixième. Elle confie à son journal sa joie de retrouver ses copines et le chemin des cours, de participer à l’anniversaire d’une de ses meilleures amies, de manger une bonne pizza. Pendant ce temps, à Dubrovnik, la situation politique empire et Zlata s’inquiète pour les membres de sa famille qui s’y trouve. En avril 1992, les bombardements atteignent Sarajevo où vit Zlata. La jeune fille de onze ans voit son univers basculer. Au fur et à mesure, pour Zlata et ses parents, il devient très difficile de se nourrir, le gaz et l’électricité sont fréquemment coupés, la cave de leur immeuble devient un refuge. Il est quasiment impossible de sortir de chez soi, sans risquer les tirs ennemis. Le siège de Sarajevo enlève à Zlata toutes les joies de son enfance. Pour elle, c’est l’incompréhension. Le lecteur devient spectateur, au fil des jours, de ses interrogations et de ses espoirs.
Le journal de Zlata est un témoignage que je voulais lire depuis longtemps et je suis heureuse de l’avoir enfin lu. Il est toujours intéressant et enrichissant de lire des témoignages de guerre. Ils prennent une dimension particulière quand ils sont écrits par des enfants. Leur innocence et leur méconnaissance des règles politiques en font des témoins incroyablement sensés. Zlata l’écrit : elle ne s’y entend pas en politique, elle l’exècre et ne voit pas pourquoi des hommes dont elle n’est pas l’ennemie, la privent ainsi de son enfance… C’est un texte très facile à lire, jamais monotone et d’une grande intelligence.
L’œuvre en quelques mots…
Samedi 30 mai 1992
Dear Mimmy,
La maternité a complètement brûlé. C’est là que je suis née. Des centaines de milliers de futurs bébés, de futurs habitants de Sarajevo n’auront pas la chance d’y naître. Elle était encore toute neuve. Le feu a tout dévoré. On a pu sauver les mères et les bébés. Au moment où l’incendie s’est déclaré, deux bébés étaient en train de naître. Ils sont vivants. Ici, les gens meurent, périssent, ici tout brûle, tout disparaît, et pendant ce temps-là, des bébés, des futurs hommes, viennent au monde, en sortant des flammes.
Ta Zlata
Lundi 29 juin 1992
Dear Mimmy,
[…] Mon Dieu, est-ce que cela va cesser un jour, est-ce que je vais pouvoir redevenir écolière, redevenir une enfant contente d’être une enfant ? J’ai entendu dire que l’enfance est la plus belle période de la vie. J’étais contente de vivre mon enfance, mais cette sale guerre m’a tout pris. Mais pourquoi ?! Je suis triste. J’ai envie de pleurer. Je pleure.
Ta Zlata