Yves Pinguilly, L'Afrique d'ouest en est
Dans ces pays de brousse et de savane, le feu, l'eau, l'air murmurent à l'oreille des hommes les sagesses de leurs ancêtres. Les mots de ces contes voltigent dans le vent, dansent au son du tam-tam, du balafon ou de la cora, ils complotent avec les génies des champs ou des eaux ; ils parlent la langue secrète des femmes-éléphantes ou des hommes-lions...
Ce titre fait partie de la collection « Contes et Légendes » de Nathan Jeunesse qui doit, à mon avis, regorger de petites merveilles. Certains titres de cette collection s’intéressent à la Grèce antique, d’autres au Moyen-Age, d’autres encore aux fées et aux princesses.
Ici, ni héros à la musculature impressionnante, ni gentes dames, ni fées malicieuses. L’envol se fait vers l’Afrique et le séjour est on ne peut plus dépaysant. Dix-sept contes sont contenus dans ce recueil. Ils sont issus de la tradition orale et retranscrits par Yves Pinguilly, écrivain passionné par le continent africain. Du Sénégal à Djibouti, en passant par le Togo ou encore le Mali, chacun de ses contes se fait l’écho de la savane, nous balade de case en case, évoque les boubous et les champs de sorgho. Qu’ils finissent bien ou mal, tous ces récits ont en commun l’intelligence de leur morale et cultivent l’art des bons mots et des formules finales.
On ne peut qu’apprécier la qualité de l’ouvrage. L’abécédaire qui précède les contes est un repère essentiel. La carte, située en fin de recueil, participe également à la démarche volontairement pédagogique de l’ouvrage. Il en va de même pour la biographie de l’auteur et la bibliographie qui ferment la marche. En outre, la postface rédigée par Yves Pinguilly éclaire le lecteur sur la littérature africaine : « L’écriture de ces contes et légendes de quelques Afriques se veut à bien des égards une passerelle entre les hommes […]. Ils cachent alors en eux des prophéties assez fortes pour que les garçons, les filles, les hommes, les femmes d’aujourd’hui osent continuer à rêver leur vie. »
En résumé, c’est un petit ouvrage plein de bon sens et d’humour, bien conçu, qui mérite qu’on s’y intéresse !
L’œuvre en quelques mots…
« Le matin on sait ce qu’il faut savoir le matin. Le soir on sait ce qu’il faut savoir le soir. Celui qui cultive la terre connaît la patience. » (« Noix de Cola », p.35)
« - Ma séboaga, quand l’amour vit, il ajoute aussi de la vie à la vie. Mon amour est grand pour toi… mon amour demain et encore demain ajoutera sans cesse de la vie à la vie.
- Warga, tes mots d’aujourd’hui, est-ce qu’ils s’envoleront quand l’harmattan soufflera ? Est-ce que toi-même tu les oublieras ?
- Non, ma séboaga. Le vent n’y fera rien, ni une saison sèche ni une saison des pluies. La pluie ne fait toujours que mouiller les taches du léopard. Elle ne les efface pas. Mon amour est comme les taches du léopard. » (« La vraie raison du faux départ de Moogho Naba de Ouagadougou », p.104-105)
« Le mari se doutait que sa femme était un peu menteuse, elle qui était assez maline pour égorger un poulet sur un linge blanc sans laisser une seule trace. » (« Le Jour de la bière de mil », p.114)