Marie Garnier, Le nid des papillons
Un matin semblable à tous les autres, ou presque, je ne le sais pas encore, c’est pour aujourd’hui.
Je m’apprête à vivre l’une des journées les plus merveilleuses de la vie d’une femme, je vais être maman.
Cette journée va pourtant tout bouleverser, plus de repaires, plus d’avenir, plus de passé.
Me voilà projetée dans cet univers décalé sans y être préparée, sans même avoir conscience qu’il existait.
J’ai peur !
Que vais-je devenir ?
Que va-t-elle devenir ?
J ai longtemps cherché comment construire le combat qu’il me fallait mener, pour toi ma fille, pour ton présent, pour mon passé, pour ton futur, pour ton identité.
Lorsque Livraddict a proposé il y a quelques semaines plusieurs titres en partenariat avec les éditions Baudelaire, j’ai sauté sur l’occasion. J’avais très envie de découvrir cette maison d’éditions et c’est Le nid des papillons qui a attiré mon attention. J’ai cru, à tort, qu’il s’agissait d’un livre sur la maternité. En réalité, ce livre est un témoignage qui relate le combat d’une mère pour sa fille handicapée.
C’est un livre que j’ai ouvert assez rapidement après l’avoir reçu, un livre qu’il faut lire mais qui, même une fois lu, ne nous laisse qu’entrevoir ce que c’est que d’avoir et de voir grandir un enfant handicapé. Les mots de Marie Garnier sont chargés de douleur, de tendresse, de fierté aussi. Ce sont des mots qui touchent, que l’on soit maman ou pas.
Je ne jugerai pas la qualité « littéraire » du roman. Peu importe finalement s’il est bien écrit ou pas. Ce n’est pas là l’essentiel. Ce n’est pas le récit d’un auteur mais celui d’une maman, écrit comme on écrirait un journal intime pour y coucher ses peines et ses luttes mais aussi ses joies et ses victoires.
Marie Garnier a choisi en guise d’épigraphe une citation de Joseph Joubert que je trouve magnifique et qui résume bien le contenu du livre : « Au lieu de me plaindre de ce que la rose a des épines, je me félicite que l’épine soit surmontée de roses et que le buisson porte des fleurs. » Dès les premiers mots, on sent que l’émotion sera au rendez-vous. On pense assez rapidement au témoignage de Jean-Louis Fournier sur ses deux fils handicapés, mais la comparaison s’arrête là. L’écriture, conseillée par Lolo, une amie précieuse, est envisagée comme une thérapie. L’auteure évoque très rapidement sa grossesse et son accouchement. La maladie, une infirmité motrice cérébrale, est diagnostiquée quelques semaines plus tard. Dès lors, il faut faire face et accepter que sa fille ne soit pas un papillon comme les autres : « Anaïs est comme un papillon, dont les ailes sont toujours repliées, soudées l’une à l’autre. »
L’œuvre en quelques mots…
« La chambre est prête, refaite depuis des mois, astiquée, aseptisée, parfaite.
Viens à la maison, ma chérie, MA FILLE.
Viens, maman te porte !
Si j’avais su à ce moment précis où je venais de prononcer cette phrase j’allais la prononcer pendant des années…
Viens, maman te porte !
Ces quatre mots qui vont accompagner tous nos gestes au quotidien.
Ces quatre mots qui vont représenter ta seule mobilité ou presque.
Ces quatre mots qui vont nous faire avancer pendant des années, tant que je pourrai, tant que j’aurai la force de les prononcer.
Et un jour, je ne les dirai plus. » (p.18)