Marie-Estelle Pech, L'école de la triche
Juin 2011, la découverte de la diffusion prématurée sur Internet d'un des exercices de l'épreuve de mathématiques du baccalauréat série S impose la réévaluation des 160 166 copies concernées. Une mesure d'exception face à un événement marginal ? Ce n'est pas l'avis de Marie-Estelle Pech qui rappelle qu'en France plus de 10 % des étudiants avoueraient avoir déjà triché. Dans ce document édifiant, elle retrace l'essor universel d'un phénomène « aussi vieux que l'Homme » et s'alarme de l'augmentation exponentielle des tentatives de fraude depuis l'avènement des nouvelles technologies. Elle s'interroge aussi sur la normalisation de la triche qui semble aujourd'hui s'imposer comme « le symptôme d'une société en faillite morale ».
Marie-Estelle Pech s’est intéressée au phénomène de la triche, problème mondial en forte croissante. Quelle triche ? La fraude aux examens autant que le plagiat, facilité par la mise en ligne d’innombrables ressources sur Internet. Le constat est clair : dans cet espace de liberté, la question du droit d’auteur est complètement remise en cause. Pourtant, la triche n’est pas un phénomène nouveau. Au Moyen-Age, des cas de fraude à grande échelle avaient déjà pu être observés. Les différentes études menées le prouvent : les jeunes Français n’hésitent pas à tricher mais ils ne sont que 16% à en connaître les risques. Le sentiment d’impunité qui règne dans les établissements scolaires français ne risque pas de freiner le phénomène, la triche étant, de toute manière, répandue dans la société.
Après avoir rappelé la définition de la tricherie – phénomène qui « consiste à enfreindre une règle tout en faisant mine de la respecter » –, Marie-Estelle Pech revient longuement sur l’histoire de ce phénomène. Elle rappelle que la copie, jadis, était une manière de rendre hommage. Celle que l’on surnomme « pompe », « carotte », « copion » ou encore « bidoche » a d’ailleurs été souvent mise en avant au cinéma. Qui n’a jamais vu Les Sous-doués de Zidi ? Récemment, c’est L’Elève Ducobu qui a envahi nos écrans, pour le plus grand bonheur des enfants. La notion de droit d’auteur apparue avec la Révolution française, est confirmée le 13 janvier 1791 par une première loi visant à le protéger. Mais en 1808, avec la création du baccalauréat, la « gruge » s’est organisée. S’ensuivent alors de très nombreuses anecdotes, des cas de fraude notamment qu’on aurait bien du mal à imaginer... L’Ecole de la triche est un document agréable à lire, jamais répétitif. Je l’ai lu avec un grand intérêt car je me sens particulièrement concernée mais je pense qu’il peut être lu par tous. Dans cet ouvrage intéressant et extrêmement bien documenté, l’auteur dresse un bilan inquiétant, recensant des chiffres et des données parfois à peine croyables. Le rôle des nouvelles technologies et de facebook (« Tricher c’est permis, c’est se faire griller qui est interdit », « Je ne triche pas, j’augmente mes chances d’avoir une bonne note »…) n’est pas laissé de côté : je l’ignorais, mais sachez qu’il existe des sites spécialisés pour fabriquer de fausses étiquettes de blanco, je vous laisse deviner ce que les élèves peuvent y inscrire… J’ai beaucoup appris, au fil de cette étude.
L’œuvre en quelques mots…
« Le culte de la réussite et la survalorisation à outrance des diplômes dévaluent l’apprentissage lui-même avec un effet pervers. Il favorise le non respect des règles : seul le résultat compte, peu importe la manière. » (p.8)