Harper Lee, Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
Dans une petite ville d'Alabama, au moment de la Grande Dépression, Atticus Finch élève seul ses deux enfants, Jem et Scout. Homme intègre et rigoureux, cet avocat est commis d'office pour défendre un Noir accusé d'avoir violé une Blanche. Ce bref résumé peut expliquer pourquoi ce livre, publié en 1960 - au cœur de la lutte pour les droits civiques -, connut un tel succès. Il ne suffit pas en revanche à comprendre comment ce roman est devenu un livre culte aux Etats-Unis et dans bien d'autres pays. C'est que, tout en situant son sujet en Alabama à une époque bien précise - les années 1930 -, Harper Lee a écrit un roman universel sur l'enfance confrontée aux préjugés, au mensonge, à la bigoterie et au mal. Racontée par Scout avec beaucoup de drôlerie, cette histoire tient du conte, de la court story américaine et du roman initiatique.
Comme il est agréable de lire de beaux livres, si bien écrits et si touchants… Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur fait incontestablement partie de ces livres qui vous embarquent, immédiatement. Au fil des 400 et quelques pages qui composent le roman de Harper Lee, nous quittons notre 21ème siècle et notre canapé/fauteuil/lit (au choix) pour l’Alabama, dans une petite ville où nous attendent Atticus Finch et ses deux enfants, l’intrépide Jem et la délicieuse Scout. Les quelques années qui séparent les deux enfants ne sont pas un obstacle lorsqu’il s’agit de s’occuper dans les rues de Maycomb. Ensemble, ils font la connaissance de Dill qui deviendra très vite un camarade de jeu, s’interrogent sur un mystérieux voisin qui vit depuis quelques années enfermé chez lui, discutent avec les vieilles dames qui vivent près de chez eux, empruntant à l’une de la neige et des gâteaux, se transformant pour l’autre en conteur, lorsque la maladie arrive. J’ai tout aimé de ces jeux d’enfants et de la manière si délicate qu’a Scout de raconter les péripéties de sa jeunesse. Car il s’agit bel et bien d’un récit à la 1ère personne, mais l’histoire n’est pas racontée avec des mots d’enfant, ce qui, à mon avis, aurait tout gâché. La narratrice arrive à nous immerger dans son enfance tout en gardant un certain recul qui lui permet de réfléchir aux événements qui se sont déroulés. Tout cela, sans jamais perdre une seule miette de cette spontanéité propre aux enfants. Les petites aventures des enfants Finch sont drôles et apportent beaucoup de fraîcheur à ce roman qui traite d’un sujet difficile : Atticus, qui est avocat, doit en effet défendre un Noir accusé d’avoir violé une Blanche. Cette prise de position sera très mal vue dans le comté et Jem et Scout auront bientôt à subir les regards et paroles haineux de certains. Au-delà de l’aspect engagé du roman, cette histoire est aussi, et tout simplement, celle de deux enfants qui grandissent dans un monde qui tente d’abolir les préjugés.
Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur est vraiment une très belle lecture. A noter : j'ai trouvé la postface très intéressante.
Ce roman ayant fait l’objet d’une lecture commune « de grande ampleur », voici les avis de mes camarades de lecture : Anjelica, Fattorius, Mrs Peppys, Stellade, Nathalie, Liyah, Evertkhorus, Frankie, Leyla, Pickwick, Myletine, Latitesib, Manu, Jostein, Choupynette, Elora, Abeille.
J'en profite également pour valider ma première participation au Challenge 100 ans de littérature américaine !
L’œuvre en quelques mots…
« La seconde année était sinistre, mais Jem m’assura que plus je grandirais plus l’école m’intéresserait, qu’il avait commencé de la même façon et que ce n’était qu’à partir de la sixième année qu’on apprenait quelque chose de valable. La sixième année parut lui plaire dès le début : il passa par une brève phase égyptienne qui me déconcerta ; il essaya de marcher un pied derrière l’autre, complètement à plat, un bras devant lui, l’autre derrière. Il déclara que les Egyptiens marchaient ainsi ; je répondis que, dans ce cas, je ne voyais pas comment il réussissait à faire quoi que ce soir, mais Jem affirma qu’ils avaient accompli plus de choses que les Américains… avait inventé le papier toilette et l’embaumement perpétuel, et il demanda où nous en serions aujourd’hui sans eux. Atticus me dit de supprimer les adjectifs pour obtenir les faits. »
« La seule chose qui ne doive pas céder à la loi de la majorité est la conscience de l’individu. »