Franck Thilliez, Train d'enfer pour Ange rouge
Un cadavre en morceaux artistiquement répartis est retrouvé aux environs de Paris. La victime a été décapitée et son corps martyrisé a fait l'objet d'une mise en scène défiant l'imagination. Le commissaire Franck Sharko est dépêché sur les lieux. Les ténèbres, il connaît : sa femme a disparu depuis six mois. Aucun signe de vie, aucune demande de rançon. Et cette nouvelle affaire, en réveillant le flic qui dormait en lui, va l'emmener au cœur de la nuit, loin, beaucoup trop loin...
Il y a un an, je ne connaissais Franck Thilliez que de nom. Avec tous les avis positifs qu’il m’était donné de lire, il était évident que je n’allais pas tarder à découvrir son œuvre à mon tour. C’est un partenariat qui a hâté ma découverte et L’anneau de Moebius est même devenu un de mes coups de cœur de 2010. Son premier roman, Train d’enfer pour Ange rouge, a ensuite rejoint ma PAL. Quand Pimprenelle a décidé de mettre à l’honneur Franck Thilliez pour son rendez-vous « Découvrons un auteur », j’ai bien sûr sauté sur l’occasion. La magie a-t-elle une nouvelle fois opéré ? Oui ! D’ailleurs, Deuils de miel et La chambre des morts vont bientôt arriver chez moi.
J’ai deux bémols dont je vais vite me débarrasser. Le premier concerne le titre : je ne le trouve pas du tout attirant, il est maladroit ; ce n’est pas tant une question de longueur que de formulation. Le deuxième est, je pense, plutôt un compliment : si j’ai vraiment adoré lire ce thriller, je n’ai pas pu m’empêcher de le comparer à l’autre roman de Thilliez que j’ai lu et, pour moi, Train d’enfer pour Ange rouge est un cran en dessous niveau qualité. Du coup, je pense que c’est une bonne idée de les lire dans l’ordre et de voir l’évolution. L’anneau de Moebius m’avait littéralement scotchée, j’espère qu’il en sera de même avec les autres.
Mais revenons à notre thriller. Dans son avant-propos, Thilliez écrit : « Je me suis attaché à un récit qui, je crois, restera celui qui m’aura le plus marqué, de par sa noirceur et le peu de place qu’il laisse à l’espoir ». Comment résumer mieux Train d’enfer pour Ange rouge ? C’est en effet un roman où la noirceur est omniprésente. En témoigne pour commencer la sordide découverte faite au début du roman par l’inspecteur Sharko et son équipe et dont je vous offre un aperçu juste en dessous. Des détails, l’écrivain ne se prive pas de nous en donner et, s’ils peuvent dégoûter un certain nombre de lecteurs, ils ne manqueront pas d’enthousiasmer les autres, en quête de sensations fortes. Avec Thilliez, c’est sûr, il faut avoir le cœur bien accroché… Bientôt, d’autres morts font leur apparition et la police se voit dans l’obligation d’enquêter dans les milieux sado-masochistes : il semble en effet que le tueur ait pour projet de punir les femmes aux pratiques déviantes. Chaque scène de crime semble dépasser la précédente en horreur mais la noirceur n’est pas uniquement présente dans la mort : une nouvelle fois, Thilliez nous entraîne dans les bas-fonds de la société et ce sont bien les vivants qui se livrent à des pratiques monstrueuses. L’horreur, Sharko la connait bien puisqu’il vit depuis des mois au fond d’un gouffre où se mêlent l’incompréhension et l’attente désespérée : sa femme a disparu. J’aime beaucoup en général les romans à la 1ère personne mais, allez savoir pourquoi, cela m’a un peu déstabilisée dans les toutes premières pages. Il est clair cependant que ce choix de narration est plus que justifié : il était essentiel de pouvoir suivre la souffrance et les réflexions du personnage principal. Et je me pose une question… Dans Train d’enfer pour Ange rouge, Thilliez flirte avec le paranormal en offrant à un des personnages des dons de voyance. L’anneau de Moebius joue avec la temporalité, nous faisant croire à des choses improbables. Est-ce une habitude chez l’auteur ?
Je n’ai pu que constater, encore une fois, qu’avec Franck Thilliez les pages se tournent toutes seules. Tout y est glauque mais on en redemande… Le prochain sur ma liste est donc La chambre des morts.
Pimprenelle a répertorié tous les billets ici.
L’œuvre en quelques mots…
« Au centre de la pièce, sous les lueurs diaprées du crépuscule, huit crochets en acier, suspendus à l’extrémité de cordes regroupées à la base en un faisceau unique, vibraient dans l’air telles les branches d’un mobile enfant. Par un système complexe de nœuds et de poulies-freins, la levée du système et par conséquent, celle de la masse embrochée au métal, se contrôlait en tirant sur une corde plus grosse qui pendant et s’enroulait sur le sol. La chair ferme du corps que j’imaginais suspendu avait dû craquer comme un fruit trop mûr et, sous chaque pointe encore foisonnante de fragments de peau déchirée, luisaient des larmichettes miroitantes. Un panache rougeâtre, un élan de fougue artistique éclaboussait le mur ouest jusqu’au plafond, comme si le sang avait fui la terreur de son propre corps. » (p.19)