Faïza Guène, Kiffe kiffe demain
Doria, quinze ans, jeune Française d'origine marocaine, vit seule avec sa mère dans une cité de la banlieue parisienne. Dans son journal, elle raconte son quotidien, celui de son quartier, et dresse le portrait à la fois tendre, drôle et caustique de ceux qui l'entourent. L’itinéraire sans concession mais plein d’humour d’une adolescente d’aujourd’hui.
Kiffe kiffe demain n’est pas tant un roman que le journal intime fictif d’une jeune fille prénommée Doria. Celle-ci vit au milieu des tours, à Livry-Gargan, avec sa mère, une femme de ménage dévouée qui voudrait le meilleur pour sa fille. Doria souffre parfois de l’absence de son père : le barbu, comme elle l’appelle, est en effet reparti un beau matin au Maroc, pour y trouver une femme plus jeune. Au collège qu’elle fréquente, l’adolescente ne sympathise avec personne. Son cercle de connaissances se résume à Hamoudi et Mme Burlaud. Hamoudi est « un des grands de la cité ». Agé d’environ vingt-huit ans et traînant habituellement dans les halls du quartier, il est pour Doria un ami et lui récite des poèmes d’Arthur Rimbaud. Mme Burlaud, « elle est vieille, elle est moche et elle sent le Parapoux ». Elle est, en outre, la psychologue de l’héroïne. Il y a aussi les assistantes sociales et quelques voisines, Tante Zohra, Lila, Nabil ou encore Aziz l’épicier. Aucun n’est vraiment épargné par la narratrice qui nous livre sa vision décapante de la cité.
On pourrait se demander si ce texte n’est pas une autofiction, mais il me semble que la réponse a été donnée par Faïza Guène il y a quelques années. Quand bien même, il est tout à fait évident que l’auteure a livré un peu d’elle dans ce texte, notamment à travers ses réflexions et ses interrogations de jeune adulte. C’est un livre que j’ai lu très rapidement et plutôt apprécié. J’ai souvent souri en lisant les anecdotes racontées et j’ai pu constater que nous avons, l’auteure et moi-même, les mêmes références. Le ton léger, bourré d’humour, n’a pas été pour me déplaire. Le langage familier pourrait déranger certains lecteurs mais ce n’est pas ce qui m’a gênée. C’est une jeune fille paumée, qui se cherche, qui, visiblement, n’aime pas du tout l’école et ne passe pas son temps à lire Hugo. Alors pourquoi pas. C’est un parti-pris de l’auteur que je comprends. Non, ce qui m’a gênée, personnellement, c’est cette manière qu’a la narratrice de mettre tout le monde dans le même panier. Par exemple, tous ses profs sont des imbéciles, leurs appréciations sur le bulletin de fin de trimestre « sont toutes aussi connes les unes que les autres »… Tout n’est pas tout noir ou tout blanc. C’est un peu dommage, et un peu facile…
L’œuvre en quelques mots…
« J’en ai pas encore parlé à Maman mais je crois qu’elle aime bien Nabil parce que c’est un mec plein d’ambition. Il veut carrément participer au « Bigdil » et gagner la voiture. Ça c’est un truc que j’admire parce que moi, j’arrive pas à me projeter dans l’avenir. Faudrait que j’adopte la technique Shérif : ça fait des années qu’il joue au tiercé et qu’il perd tout le temps, mais il continue. Il s’en fout. C’est peut-être ça la solution : garder toujours un petit espoir et ne plus avoir peur de perdre. » (p.128)