Eva Almassy, Petit éloge des petites filles
Que savent les petites filles que l’on ne sait pas ? Ce qui revient à se demander ce que l’on sait d’elles, un beau paradoxe.
Voici un petit livre qui trainait dans ma bibliothèque depuis trois ans environ. Même si d’autres livres « fille(s) » me tentaient davantage, je me suis dit que c’était enfin le moment de l’en sortir…
J’ai d’abord lu les soixante-dix premières pages de cet essai sans prendre de notes, avant de le laisser complètement tomber, ayant eu peu de temps à accorder à la lecture ces dernières semaines. Je dois aussi avouer que, dès les premières pages, j’ai senti que j’allais être très déçue par ce texte qui semblait pourtant prometteur. Mais j’ai préféré m’obstiner (après tout, on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise) plutôt que de choisir un autre titre et je m’empresse dès à présent de vous livrer mes impressions sur ce Petit éloge des petites filles.
Cinq parties le composent et laissent à penser que la réflexion sera organisée et progressive : I. Etre, II. Savoir, III. Vraies princesses, IV. Filles d’Eve, V. Invités. La première partie s’ouvre sur un tableau âge/taille/poids qui n’est nullement commenté et je m’interroge encore sur sa réelle utilité. Passons. Arrivent les premiers mots : « Je tiens les petites filles pour les êtres les plus parfaits sur terre, mais on m’a entendue dire la même chose des tigres, il va falloir argumenter. » (p.11) Allons bon. On attend donc impatiemment l’argumentation en question. Malheureusement, les premières pages à peine tournées, me voici saisie d’un véritable mal de tête. J’exagère à peine, jugez plutôt : « Ce qu’elles comprennent est compris dans leur être. Inter- « entre », interior « plus entre », intimus « le plus entre ». L’intérieur étant comparatif, l’intime serait superlatif. Une question d’intériorité, de « dedans », mais je tiens au mot « entre ». Dans ce comprendre et ce savoir, ce qui compte avant tout est « interpersonnel ». L’intime, et l’appel fait à l’intime de l’autre. » (p.11-12) Vous suivez ? S’ensuivent alors différentes petites sections qui nécessitent que le lecteur s’accroche solidement : si l’auteure semble avoir pris plaisir à choisir ses mots et construire ses phrases, on finit par se demander si cela n’est pas fait en dépit du sens. Moi, en tout cas, je n’ai pas tout compris. Morceau choisi : « Non seulement l’intime est superlatif mais la petite fille est le superlatif de ce superlatif qu’est l’intime. » (p.12) Les tentatives poético-philosophiques sont (trop) nombreuses et participent à la confusion générale. Quel lien y a-t-il entre certaines idées développées ? On perd le fil, à de nombreuses reprises. Les références littéraires et cinématographiques, entre autres, se bousculent, on ne sait plus où donner de la tête. L’espoir est là pourtant : la seconde partie sera-t-elle meilleure que cette première dont je n’ai rien retenu ? Espoir déçu. Je continue à me demander où l’auteur veut en venir, j’ai du mal à saisir les intitulés « Etre » et « Savoir ». Je ne sais plus qui parle, si c’est l’auteure elle-même ou si elle fait une citation, et surtout, je finis par ne plus savoir de quoi on parle… La troisième partie part du postulat selon lequel « toutes les petites filles sont des princesses » (p.75) et évoque brièvement des anecdotes au sujet de petites filles, princesses ou non, réelles ou imaginaires, certaines intéressantes, d’autres insignifiantes. La quatrième partie est quant à elle très largement autobiographique, elle s’éloigne du reste de l’essai, mais elle est beaucoup plus claire. Dans la cinquième partie, cinq invités livrent un court texte sur le thème des petites filles. Là encore, les cinq textes sont inégaux et on peine à voir l’utilité de certains d’entre eux… Celui qui m’a le plus convaincue a été rédigé par le seul « invité » masculin. Finalement, l’humour que je m’attendais à trouver dans cet essai est absent. Petit éloge des petites filles est un ouvrage lourd et bien compliqué pour des êtres qui ne sont que légèreté.
L’œuvre en quelques mots…
« Innombrables infinies petites filles des cinq continents qui peuplent la terre de rires d’oiseaux en tissant autour de leurs millions de doigts des berceaux de chat avec d’infinies ficelles. » (p.14)
« Tout le monde connaît ce vers de Mallarmé, oraison funèbre d’une petite fille : « elle a vécu ce que vivent les roses, l’espace d’un matin ». Donc le temps. La petite fille est d’essence temporelle, et son temps est bref, volatil, même si elle a de ces longs regards ombrés de cils infinis. » (p.31)