Ginette Kolinka, Jean-David Morvan & Victor Matet, Adieu Birkenau
En avril 1944, à 19 ans Ginette Kolinka est déportée au camp d'extermination Auschwitz II-Birkenau.
Elle n'en parle pas durant 50 ans, avant d'accepter d'être filmée pour la "Shoah Foundation", que Steven Spielberg vient de créer.
À la grande surprise de la septuagénaire, les souvenirs enfouis rejaillissent. Elle se lance à corps perdu dans le témoignage.
En octobre 2020, à 95 ans, elle permet à Victor Matet et Jean-David Morvan de l'accompagner lors d'un de ses voyages de groupe en Pologne, à l'issue duquel elle décide de ne plus jamais revenir.
Dans cet album bouleversant mis en images avec pudeur et puissance par Efa, Cesc et Roger, elle fait le point entre son premier et son dernier passage dans « le plus grand cimetière du monde » avec ce mélange unique de force, d'humour et d'espoir qui la caractérise.
Même si les témoignages sont à mon sens toujours plus forts, les bandes dessinées et romans graphiques qui s’intéressent à la question de la Shoah ne manquent généralement pas de qualités. C’est une nouvelle fois le cas avec Adieu Birkenau, ouvrage issu de la collaboration de Ginette Kolinka avec, entre autres, Victor Matet, journaliste, et Jean-David Morvan, scénariste de bande dessinée. Adieu Birkenau s’ouvre sur le bras tatoué de Ginette Kolinka et le point de vue de son fils, Richard Kolinka : enfant, il pensait que toutes les mamans avaient un numéro tatoué sur le bras, jusqu’à ce qu’il découvre la vérité. On retrouve ensuite Ginette Kolinka chez elle, recevant l’appel d’un professeur qui souhaite la faire venir dans son établissement, avant d’être plongé en juin 1942. C’est le parti pris par Adieu Birkenau : des allées et venues entre un passé teinté de sépia et de gris et un présent plus coloré en dépit de la présence continuelle d’ombres représentant les déportés disparus. Le passé s’attarde sur les restrictions, le port de l’étoile jaune, le passage en zone libre, l’arrestation et, bien sûr, le camp d’Auschwitz-Birkenau. Le présent est centré sur le dernier voyage effectué par Ginette Kolinka à Birkenau, en compagnie d’adolescents et de Victor Matet et Jean-David Morvan. Dans ce lieu qui constitue « le plus grand cimetière du monde », Ginette Kolinka se souvient et témoigne, tentant de faire revivre le décor silencieux qu’est devenu le camp et mettant tout en œuvre pour que les adolescents qu’elle accompagne puissent un jour à leur tour devenir des passeurs de mémoire. L’ensemble est convaincant tant sur le plan de la forme que du fond et me paraît tout à fait apte à sensibiliser les plus jeunes.